« Parce que nos coups de gueule sont des cris de détresse… »
Parce que la vulnérabilité est au cœur de nos métiers, celle des professionnels, celle des personnes accompagnées, parce que reconnaître cette vulnérabilité commune, qui traverse le commun des mortels mais dont certains se pensent protégés, est la condition sine qua non pour s’engager dans le secteur social, il est de ces situations qui nous mettent à feu et à sang, qui nous font hurler à en perdre la voix, qui nous désossent de l’intérieur et qui transforment notre détresse en rage…que cette rage puisse perdurer aussi longtemps que l’être humain sera ! Nous nous devons de la porter, au risque de perdre notre vulnérabilité, et donc notre humanité.
Qu’il s’agisse de personnes âgées, de demandeurs d’asile, de mineurs, de femmes victimes de violence, de grands précaires ou de personnes handicapées, nos vies, en tant que professionnels du social, sont impactées par des rencontres humaines qui nous rappellent, s’il le faut, que nous sommes tous et toutes vulnérables. Nous sommes tous emprunts, et riches, de ces histoires, qui viennent modeler nos vies professionnelles bien sûr, et personnelles. Pour autant, toutes nos détresses ne prennent pas systématiquement la forme de coup de gueule, car nous sommes formatés, et cela est peut-être salvateur… ou aliénant, c’est selon.
Mais certaines rencontres, certains accompagnements restent marqués au fer rouge, et viennent concrétiser toutes les inepties, toutes les abominations, et toute la barbarie du système, dont les politiques sociales successives ne sauraient nuancer le propos. Ces accompagnements sont prenants, voire traumatiques mais ce sont ceux-là mêmes qui nous permettent de rester humains, et de sortir, enfin, d’un formatage plus que souhaité et imposé par le système.
Accepter cette rage qui nous anime c’est reconnaître la détresse humaine, à laquelle nous nous confrontons jour après jour.
Parce que tant qu’il y aura des êtres humains, il y aura des professionnels du social, nous nous devons de laisser une place à cette rage, garante de l’humanité de la société.